Un pléonasme, encore : l’art engagé
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Les absents vivants ont toujours tort. Les autres n’y sont pour rien.
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Prendre un dessin comme on prend note, comme on prend un amant, ou comme on prend son amant ?
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Rien comme les autres : dans le travail de peinture, être méthodique c’est commencer ici, là, à droite, à gauche, en haut et en bas, être partout à la fois, ne rien finir.
De même, être observateur c’est saisir le tout, mépriser le détail, écraser la petite bête.
Rien comme les autres, je vous dis.
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Entendue lors d’une émission de radio publique vulgarisante depuis le salon du livre de Paris sur le thème « comment se faire publier », la question suivante : faut-il lire pour écrire? Un intervenant répond : « une vache ne boit pas de lait ». Ce à quoi j’aurais rétorqué : « oui, mais les camions-citernes font le plein ». Mais je n’étais pas invité.
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On ne reprise pas ses souvenirs déchirés. Mais on ne les jette pas non plus. Alors on vit avec les accrocs.
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Des nouveaux artistes réalisent des magnifiques tableaux Excel.
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Dessiner à la sanguine le jour où la modèle est indisposée : esprit d’à propos ou simple coïncidence ? Peu importe, le dessin lui-même sera un euphémisme.
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Déjeuner estival au jardin après une matinée d’atelier. J’entends un pic épeiche planter son clou dans le bois du vieux noyer. Je dois lui livrer une toile ce soir.
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Le principal ennemi du dessin, ne serait-ce pas la désinvolture ?
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Entre chien et loup, plus près du loup, chauve-souris.
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Face à la peinture, on est seul.
Dans la peinture, on ne l’est plus.
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D’où vient cette habitude si répandue qu’ont ces gens de terminer chaque phrase, quelle qu’elle soit, anodine ou sérieuse (rarement profonde, c’est entendu), réflexion, récit ou anecdote, par un rire idiot, de toute façon ?
Le pire étant, juste avant le rire, le « voilà quoi « .
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Un jour sans vent, les goélands posés n’ont aucun sens commun.
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Rester jeune, c’est garder le bec et les ongles
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Je ne supporte pas que l’on confonde philosophie avec résignation, acceptation, ou fatalisme.
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Une des plus belles baies d’ici, essentiellement d’or et d’azur (Léonard), encaissée profondément entre l’horizon et le graphisme sec de ses roches virides, au sable épais et blond, à la lumière subtilement suspendue entre la transparence de l’air et l’écrasement des chaleurs, pleine du silence coloré de l’écume mourante et des enfants qui jouent à perdre leurs illusions (le rempart tiendra devant la marée montante). Deux jeunes idiots, leur technologie en main : « y a pas de réseau, c’est de la merde cette plage ! »
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Argumenter par écrit évite d’être interrompu
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« Il n’y a pas de mots », lieu commun utilisé bien souvent, trop souvent, par des concernés de loin ou par ceux qui ne s’attendaient pas à ce qu’on demande leur avis sur un drame. D’une part, « il n’y a pas de mots », ce sont déjà des mots, et d’autre part, si, il y en a bien d’autres, une infinité. Mais il faudra faire un effort.
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La parole se vide jusqu’à devenir creuse, voilà quoi, hi hi !
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